afp / publié dans Libération du 21 février 2007
Les femmes, premières victimes de la précarité
Un rapport de la Délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale dresse un contrat peu glorieux sur la condition des femmes en France. Elles vivent plus souvent sous le seuil de pauvreté que les hommes.
Travailleuses pauvres, chefs de famille monoparentales, retraitées, les Françaises sont de plus en plus exposées à la précarité. C’est ce qui ressort d’un rapport de la Délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, dont l’AFP a eu copie et qui sera rendu public officiellement début avril.
On y apprend notamment que les femmes vivent plus souvent que les hommes sous le seuil de pauvreté en France. La majorité des allocataires de minima sociaux sont en effet des femmes, et le taux de pauvreté des plus de 75 ans est deux fois plus élevé chez les femmes que chez les hommes.
Les inégalités pointées par le rapport
Le rapport dénonce en particulier la persistance des inégalités et la fragilité des femmes sur le marché du travail, masquées par l’essor du travail féminin depuis les années 1950. Cet essor s’est ralenti depuis une quinzaine d'années et un écart significatif demeure entre le taux d’emploi des hommes et celui des femmes. Par ailleurs, les emplois dont bénéficient les femmes sont souvent des emplois atypiques (temps partiels, précaires), et dans les secteurs dits « féminins », donc mal rémunérés et fragiles.
Pour les « travailleuses pauvres », la tentation est forte de quitter le marché du travail à la venue des enfants. Le rapport rejoint le constat de nombre d’experts: le déficit de places en mode de garde collectif et la création du congé parental poussent les femmes en situation d’emploi précaire à abandonner leur travail.
Cela conduit à l’apparition « de nouvelles inégalités », entre femmes cette fois, l’écart se creusant entre les « gagnantes » (bien insérées, disposant d’emploi stables et bien rémunérées) et les « perdantes » (travailleuses en temps partiel et bas salaires). Ces inégalités se déclinent dans l’emploi, l’accès aux mode de garde, les salaires et donc les retraites.
Les femmes chefs de famille, dont le nombre augmente (23% d’augmentation entre 1990 et 1999) sont de plus en plus en situation de précarité. Leur taux de chômage est presque deux fois plus élevé que celui des mères en couple. Elles forment le gros bataillon des femmes à temps partiel subi.
Cette précarité de l’emploi « conduit légitimement à craindre une nouvelle dégradation de la situation des femmes retraitées », dont le montant de retraite dans le secteur privé était en 2004 déjà inférieur de 38% à celui des hommes.
Les recommandations de la Délégation
Pour inciter les femmes à rester dans l’emploi, la Délégation recommande l’amélioration du système de garde des enfants et l’aménagement du congé parental. Rejoignant le rapport de la députée UMP Valérie Pécresse, elle souhaite que ce congé soit « plus flexible », fractionnable au-delà des trois ans de l’enfant pour éviter un retrait trop long du marché du travail, mieux partagé entre les deux parents et mieux rémunéré.